1) La voie de la solution amiable
Quand l’action judiciaire risque d’être engagée[1], et notamment pour des raisons de coût, de temps ou pour des raisons tenant au risque juridique induit par une telle action (perte d’une marque, invalidation d’un dessin ou d’un modèle, reconnaissance de l’absence d’originalité d’une création, par exemple), les parties peuvent préférer ne pas s’affronter devant les tribunaux et trouver un accord leur permettant de régler leur différend à l’amiable.
Cet accord constitue une transaction au sens du Code civil[2], au sens où les parties préviennent par cet accord une contestation née ou à naître. Par la transaction, les parties s’obligent à des concessions réciproques et conviennent de mettre fin de manière définitive à leur différend.
On dit que la transaction a l’autorité de la chose jugée en dernier ressort[3]. Elle ne peut donc pas donner lieu, une fois qu’elle est conclue, à une action judiciaire fondée sur les mêmes faits.
En matière de propriété intellectuelle, cet accord transactionnel peut prendre des formes variées :
En dehors de toute procédure judiciaire, en vue de la résolution amiable de leur différend, les parties peuvent également passer par la médiation ou la conciliation conventionnelle[4]. Les procédures de médiation et de conciliation font toutes les deux intervenir un tiers dans le processus de règlement mais de manière distincte.
La médiation consiste dans le recours à un tiers, le médiateur, afin qu’il conduise activement les parties en conflit à trouver une solution de compromis.
La conciliation consiste en l’intervention d’un auxiliaire de justice bénévole, le conciliateur, qui présente des garanties en termes de discrétion et d’impartialité. Il est chargé de rencontrer les parties, de les écouter et de les inviter à adopter une solution de compromis. Il n’est pas actif, en ce qu’il est chargé de trouver une voie d’entente sans définir lui-même les termes d’un éventuel accord.
Depuis 2015, les parties à un différend ont l’obligation de justifier dans l’acte de saisine des diligences qui ont été entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige, à moins que l’urgence, ou la matière, ne le permette pas[5].
Par la voie de cette mention obligatoire, le législateur impose au demandeur de rechercher une solution amiable avant d’engager une procédure contentieuse en matière civile.
2) La voie de l’arbitrage
Les parties peuvent également préférer poursuivre sur la voie contentieuse mais sans passer par la voie judiciaire. C’est le cas notamment des litiges internationaux complexes.
Dans une telle hypothèse, elles peuvent décider d’avoir recours à l’arbitrage, procédure alternative de résolution des conflits où les parties soumettent leur différend non pas à une juridiction étatique mais à un juge privé, l’arbitre.
La loi prévoit d’ailleurs expressément cette solution alternative en matière de marques ; l’article L.716-4 du CPI prévoit que les dispositions du Code selon lesquelles les actions en matière de marques sont portées exclusivement devant les tribunaux de grande instance compétents ne font pas obstacle au recours à l’arbitrage[6].
La solution déterminée par l’arbitre, appelée sentence arbitrale, a l’autorité de la chose jugée entre les parties[7]. Elle peut faire l’objet d’une exécution forcée, comme la décision d’une juridiction étatique, à condition qu’elle ait été soumise pour vérification[8] à un tribunal de grande instance lui ayant apposé la formule exécutoire (appelée exequatur).
Attention : l’arbitrage, qui ne peut porter sur des questions d’ordre public, ne peut pas, pour cette raison, concerner tous les litiges de propriété intellectuelle :
Avantages : la procédure est souvent plus rapide que devant les juridictions étatiques. Les arbitres font souvent preuve d’une haute technicité (c’est toutefois de plus en plus le cas pour les juridictions nationales, notamment avec le développement des juridictions spécialisées).
Inconvénients : l’arbitre est rémunéré par les parties. Le coût de la voie arbitrale peut être élevé. L’indépendance de l’arbitre n’est pas garantie (si ce n’est pas le fait que les parties le choisissent d’un commun accord).
La société PAPERART a conclu un contrat de licence de marque avec un licencié américain, la société ABCD, qui a elle-même sous-licencié la marque à une société singapourienne.
Un différend naît sur la question du paiement des redevances de sous-licence, impactant à la fois le licencié ABCD et le concédant PAPERART.
Les enjeux financiers sont en outre très conséquents pour l’ensemble des parties.
Etant donné le caractère international du litige et l’importance des enjeux, les parties choisissent de recourir à l’arbitrage.
Elles choisissent un spécialiste des licences de marques à Singapour et lui soumettent leur question. L’arbitre rend une sentence arbitrale qui s’impose ensuite à toutes les parties.
1) L’amiable composition
Il est possible aux parties dans une instance arbitrale de conférer à l’arbitre de trancher le litige qui les oppose non pas selon les règles de droit[9], mais selon l’équité, en recherchant la solution la plus adaptée aux intérêts respectifs des parties. L’arbitre statue alors en amiable compositeur, selon la formule consacrée par l’article 1478 du Code de procédure civil.
La sentence rendue par l’arbitre statuant en amiable compositeur a la même portée que celle rendue lorsque l’arbitre a statué selon les règles de droit.
2) La médiation
Le Tribunal, saisi d’un litige peut inviter les parties à chercher une solution amiable.
Le Tribunal rend alors un jugement (qui ne statue pas sur les prétentions des parties) aux termes duquel il nomme un médiateur. La mission de ce médiateur est d’aider et de guider les parties dans les négociations, afin de parvenir à un accord.
Si cette médiation abouti à un accord, cet accord peut être homologué par le Tribunal. A défaut, l’affaire se poursuite devant le Tribunal, au stade où elle en était restée.
Le médiateur est nommé pour une durée initiale de 3 mois (renouvelable une fois). Les honoraires du médiateur s’élèvent à la somme de 3.600 € environ.
[1] Ou quand elle l’est déjà.
[2] Articles 2044 et suivants du Code civil.
[3] Article 2052 du Code civil.
[4] Articles 1530 et suivants du Code de procédure civile.
[5] Articles 56 et 58 du Code de procédure civile.
[6] « Dans les conditions des articles 2059 et 2060 du Code civil », c’est-à-dire, hors questions relevant de l’ordre public
[7] Article 1476 du Code de procédure civile.
[8] Notamment de la régularité de l’instance arbitrale. Article 1477 du Code de procédure civile.
[9] Les règles tenant à l’ordre public fondamental doivent cependant être respectées, même dans ce cas.