Existe-il un intérêt a cumuler différents types de protection ?

Vincent Fauchoux
Par Vincent Fauchoux
Avocat au barreau de Paris et cofondateur du site BlockchainyouIp.
Ancien président de l'association Cyberlex (2005- 2007), il est à l'origine des Rencontres annuelles du Droit de l'Internet.

Principe : La possibilité du cumul d'un droit d'auteur et d'un dessin et modèle

Une même création peut être protégée simultanément par le droit d’auteur et par le droit des dessins et modèles, à la condition de satisfaire aux conditions requises par chacun des régimes de protection (en substance, originalité pour la protection par le droit d’auteur ; nouveauté et caractère propre pour la protection par le droit des dessins et modèles).

Le créateur pourrait se contenter de la protection offerte par le droit d’auteur qui ne nécessite aucun dépôt. Toutefois, la protection offerte par le droit des dessins et modèles présente des avantages certains :

  • le déposant dispose d’un titre de propriété industrielle matérialisé et délivré par un établissement public, qui ne peut souffrir aucune contestation de forme (l’INPI[1]) ;
  • la personne à l’origine de la demande d’enregistrement et dont le nom est indiqué sur le titre (ou la personne morale qui l’exploite) est présumée propriétaire du dessin ou du modèle[2]; contrairement au droit d’auteur, elle n’aura donc pas à faire la preuve de ce qu’elle est effectivement titulaire du droit (parce qu’elle est l’auteur ou qu’elle est le cessionnaire de l’auteur[3] );
  • les critères de la protection (nouveauté et caractère propre) peuvent être plus aisés à prouver que le critère de la protection par le droit d’auteur (originalité), notamment en ce qu’ils sont plus objectifs.

Exemple : Alain cumule un droit d'auteur et un dépôt de dessin et modèle

Alain, jeune designer de meubles parisien, a créé un modèle de lampe en 2016, qui est dès lors protégé depuis sa création par le droit d’auteur.

Pour plus de sureté, il dépose un modèle auprès de l’INPI relatif à cette lampe en juin 2017.

Il constate en décembre 2017, qu’un tiers propose à la vente un modèle de lampe qui reprend les caractéristiques originales de celle qu’il a créée.

Il choisit d’assigner le contrefacteur sur le seul fondement du modèle qu’il a déposé. Il considère en effet qu’il n’a pas suffisamment d’éléments attestant qu’il est l’auteur de la lampe, alors qu’il est présumé propriétaire du modèle déposé puisque son nom figure sur le dépôt.

Alain estime également qu’il ne pourra pas prouver facilement que cette lampe porte l’empreinte de sa personnalité (donc qu’il est original) et que le tiers aura les plus grandes difficultés à prouver que la lampe est nouvelle et n’a pas de caractère propre.

Pour aller plus loin

La protection offerte par le droit d’auteur peut être complétée par le dépôt d’un dessin ou d’un modèle, mais également par le dépôt d’une marque verbale, semi figurative ou tridimensionnelle, à condition que les conditions requises pour enregistrer une marque soient satisfaites (rappelons que la marque doit être licite, distinctive et disponible – cf. supra).

La protection consentie est complémentaire et différente.

En effet, ce n’est plus la création de forme en tant que telle que le créateur cherche à protéger, mais la création de forme en tant que signe distinctif de son activité, garantie d’origine de ses produits.

C’est la raison pour laquelle les atteintes sanctionnées seront également différentes.

[1] L’OHMI pour un dessin et/ou modèle communautaire

[2] Article L.511-9 du CPI.

[3] Avec la réserve que, en matière de droit d’auteur, la personne morale qui exploite sous son nom une création est également présumée titulaire.