Les dessins et modèles bénéficient de la double protection offerte par le droit d’auteur et par le droit des dessins et modèles (livres I, III et V du Code de la propriété intellectuelle) et permettent de protéger l’apparence d’un produit ou d’une partie d’un produit (tel que les motifs décoratifs qu’il incorpore), caractérisés par ses lignes, ses contours, ses couleurs, sa forme, sa texture ou ses matériaux[1].
Ils ne peuvent en revanche protéger une idée, un genre ou un style.
La personne qui dépose un dessin ou un modèle auprès de l’INPI se voit accorder un monopole d’exploitation en France, pendant une durée de 5 ans (renouvelable par tranches de 5 ans pour une durée maximale de 25 ans).
Un dessin ou un modèle ne peut être protégé que s’il est nouveau, qu’il présente un caractère propre, et qu’il est visible[2].
1) La nouveauté
Le dessin ou le modèle doit être considéré comme nouveau lorsqu’à la date du dépôt, aucun dessin modèle identique n’a été divulgué[3] (un dessin dont les caractéristiques ne différeraient d’un dessin antérieur que par des détails insignifiants ne pourrait être considéré comme nouveau);
Le déposant doit donc s’assurer qu’il n’existe pas de créations antérieures qui auraient été divulguées.
2) Le caractère propre
Le dessin ou le modèle est réputé présenter un caractère propre[4] lorsque l’impression visuelle qu’il produit sur « l’observateur averti » diffère de celle produite par tout dessin ou modèle divulgué avant la date de priorité revendiquée et que l’auteur du dessin a fourni un effort de création[5].
Cette appréciation porte sur l’ensemble de l’objet et non sur des parties spécifiques de celui-ci.
A défaut de caractère propre, le dessin ou le modèle ne peut bénéficier de la protection du livre V du Code de la propriété intellectuelle[6].
3) Le caractère visible
L’élément déposé doit également être visible, lors de l’acquisition du produit.
La Cour d’appel de Paris a en effet jugé que l’apparence du modèle devait être perceptible lors de son offre à la vente et non à l’occasion de son utilisation, c’est-à-dire au regard des acquéreurs du modèle et non pas au regard des utilisateurs de ce modèle[7].
4) Eléments qui ne peuvent être déposés à titre de dessin ou de modèle
En revanche ne peuvent être déposés les dessins ou les modèles :
JC, jeune créateur parisien, a créé un modèle de sac le 20 mai 2017, ainsi que deux modèles de portefeuilles pour femmes. Ces créations bénéficient depuis leur création de la protection par le droit d’auteur (sous réserve de leur originalité).
Aucune divulgation n’est encore intervenue à ce stade, mais un défilé est prévu le 20 février 2018.
Une recherche d’antériorité a permis à JC de s’assurer que ses créations étaient nouvelles et qu’elles présentaient un caractère propre.
JC décide en conséquence de déposer ces modèles auprès de l’INPI.
La jurisprudence considère que si un effort de création est nécessaire, celui-ci peut résulter de la combinaison d’éléments appartenant au domaine public ou qu’il est possible de trouver dans la nature[9].
L’appréciation du caractère propre s’apprécie au regard d’un « observateur averti ». C’est-à-dire d’une personne plus qualifiée qu’un consommateur qui serait dotée « d’une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience professionnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré »[10].
[1] Article L. 511-1 du Code de la propriété intellectuelle
[2] Article L. 511-2 du Code de la propriété intellectuelle
[3] Article L. 511-3 du Code de la propriété intellectuelle
[4] Article L. 511-4 du Code de la propriété intellectuelle
[5] Cass. Com 6 mai 2003 – 00-20.669
[6] La Cour d’appel de Paris a ainsi jugé qu’un couteau laguiole qui reprenait les caractéristiques propres aux couteaux laguiole, était dépourvu de caractère propre : la combinaison des traditionnels trois éléments (lame, ouvre-boîte et tire-bouchon) dans un habillage caractéristique du style Laguiole, ne conférait pas au modèle une physionomie propre ou nouvelle (CA Paris, 4e ch. A, 6 avr. 2005, n° 2003/22132, PIBD 2005, n° 813, III, p. 479)
[7] CA Paris, 4e ch. B, 4 mars 2005, n° 2003/03989, PIBD 2005 n° 812, III p. 437
[8] CA Paris, 4e ch. A, 28 sept. 2005, n° 2004/20419, PIBD 2005, n° 820, III, p. 746
[9] Cass. Com 22 mars 2005
[10] TGI Paris, 15 févr. 2002, Propr. intell. 2002, n° 80, obs. F. Greffe